"[…] J’ai essayé/ de commencer un grand tableau/ ballade à l’arc en ciel ou un Concert d’ange, pour m’evadér de toutes les choses douloureuses/ dont nous vivons depuis/ la guerre, parfois vous devez/ trouvez dans la nature une/ grande consolation, car comme/ dit notre cher Rollinat la nature/ ne rend heureux les innocent[s] et les sages, quelle profonde verite […]" [sic] (Philippe Smit 1942)
Très probablement, à cause de la situation défavorable à Pau pendant la guerre1, il ne lui était pas possible d’exécuter sur place ce projet dont la réalisation a dû attendre le retour du peintre à Thoury-Ferrottes. Le 16 avril 1944 Berendina écrit à des amis: "[...] et Ph[illipe] va finir son concert d'anges."2
L’ange solitaire ou en groupe est un thème récurrent dans l’œuvre de Philippe Smit. Souvent ses représentations sortent du cadre conventionnel de l’iconographie chrétienne et montrent ces êtres célestes sur terre, faisant même des tâches courantes, tel que l’ange qui tricote (voir [PS 257] et [PS 353]). Toutefois, ces créations ne sont nullement le pur produit de l’imagination de l’artiste, au contraire ils reflètent sa connaissance profonde des écrits de Swedenborg.
Dans plusieurs ouvrages, Swedenborg relate ses expériences mystiques qui le conduisent à visiter les anges dans les cieux, et à découvrir qu’ils n’ont pas été créés au commencement des temps comme le professe la doctrine chrétienne. Car pour lui, le ciel est peuplé d’humains, dont le comportement et la foi sont récompensés, après leur mort, par leur transformation en anges.
Ce faisant, ils gardent leur apparence humaine, mais "voient et entendent d’une manière beaucoup plus exquise […] pensent aussi d’une manière plus sage […] car ils voient d’après la lumière du Ciel"3 "et plus ils vivent […] plus ils marchent vers un printemps plein de plaisirs et de bonheur […]."4
Parallèlement, dans le monde spirituel qui est le leur, Swedenborg indique qu’il y a des collines et des vallées, des palais et des maisons comme dans le monde naturel et toutes les choses qu’on est habitué à voir sur terre. "[…] ces choses, et d'autres en nombre indéfini qui sont encore plus parfaites, sont placées par le Seigneur devant leurs yeux, mais que néanmoins elles réjouissent plus leurs mentals que leurs yeux."5
1. Voir Chronologie 1940.
2. Berendina Urban-Smit, LAS à des amis, 16 avril [1944] (archives privées, Paris).
3. Swedenborg, Emanuel, Du Ciel et de ses merveilles, et de l'enfer, d'après ce qui a été entendu et vu, traduction Le Boys Des Guays, Paris: Librairie Fischbacher 1899, n° 462, p. 338.
4. Le Cercle Swedenborg de Lausanne: Les enseignements, Les mondes supérieurs (textes de synthèse et d'explication) http://www.emmanuelswedenborg.info/enseignements/lavieapreslamort/ciel.html [consulté le 3 novembre 2016].
5. Swedenborg, Emanuel, op.cit., n° 185, p. 122.